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est une artiste.
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En ce moment, elle travaille dans
Vous pouvez participer à son exposition collective dans un trou noir ici :
et découvrir le mini musée sous son atelier.
Et jouer à , les histoires à embranchements écrites par beaucoup beaucoup de personnes ensemble à partir des œuvres du FRAC MÉCA Nouvelle Aquitaine.
🖋️ Quelques textes sur son travail sont lisibles ici :
La lune est une balle de baseball Nina Leger, 2025 Vous êtes une œuvre de Marianne Vieulès, vous êtes la rencontre, dans la lumière matinale d’une cuisine familiale américaine, entre un astronaute, une informaticienne et un enfant en retard pour son match de baseball. Vous êtes une œuvre de Marianne Vieulès, vous êtes Jorge Luis Borges déclarant à Richard W. Burgin : « C’est presque insulter les formes du monde que de penser que nous pouvons inventer quelque chose ou que nous ayons même besoin d’inventer quoi que ce soit. » {note} Vous êtes une œuvre de Marianne Vieulès et vous n’inventez rien. Cette cuisine, cet astronaute, cette informaticienne et cet enfant existent mais ils ne s’étaient jamais rencontrés avant vous et en-dehors de vous. À bien y regarder d’ailleurs, le toast que l’enfant s’apprête à mordre est grillé à l’effigie de Youri Gagarine – étrange détail pour une scène de cuisine américaine. Vous êtes une œuvre de Marianne Vieulès, vous exposez la solitude des machines – comme dans la vidéo de ce lance-balle obstiné dont personne ne renvoie les projectiles alors qu’en sous-titre défilent les paroles de « I’ll be there for you », le générique de Friends, cette série où personne n’est jamais seul·e. Vous êtes une œuvre de Marianne Vieulès, vous aimez faire les choses vous-même. Vous êtes la reproduction faite main du Jet Propulsion Laboratory de la NASA. Vous êtes une compilation de ce que les astronautes sont ou doivent être sous forme de courts poèmes commençant tous par « Vous êtes un astronaute, vous… » Vous êtes une œuvre de Marianne Vieulès, vous ne qualifiez pas, vous ne jugez pas, vous préférez un mot en moins à un mot de trop. Vous parlez de croyance et de superstition comme vous parlez de sciences, parce qu’elles ont en partage l’obstination et la possibilité de l’échec. Vous êtes une œuvre de Marianne Vieulès et la pensée associative est pour vous un principe. Ainsi, vous avez élaboré un genre de baseball inspiré par des guetteur·ses d’extra-terrestres catalan·es où les joueur·ses portent des maillots floqués d’après les noms d’acteur·rices américain·es ayant joué des astronautes. Quand vous en parlez, ça tombe sous le sens – exactement comme le flux de conscience de Nick Shay, ce personnage du roman Outremonde de Don DeLillo {note}, qui associe des choses qui semblent n’avoir rien de commun mais dont le rapprochement obstinément répété finit par causer l’apparition miraculeuse d’une signification. D’ailleurs, Outremonde s’ouvre par un mythique match de baseball où, le 13 octobre 1951, les Giants l’ont emporté sur les Dodgers. D’ailleurs, Nick Shay était fan des Dodgers. D’ailleurs, des années après le match, il a trouvé et acheté la balle originale de cette défaite. Il a voulu posséder l’objet qui contenait « le mystère de la malchance, le mystère de la défaite » – il a voulu une balle pour « commémorer un échec ». Vous êtes une œuvre de Marianne Vieulès. Le petit-déjeuner est terminé, la tartine est mangée, l’astronaute et l’informaticienne sont partis, l’enfant a enfilé sa chasuble, vous pouvez enfin vous mettre au travail. Mais, si vous n’êtes pas une œuvre de Marianne Vieulès et que vous voulez comprendre pourquoi il a été question de baseball pour parler d’une œuvre qui semble bien plutôt intéressée par l’exploration spatiale, il vous suffit de regarder des films américains sur l’espace et les extra-terrestres – et peut-être aussi de comprendre pourquoi un homme peut rêver de posséder le souvenir d’un échec. Alors, vous verrez que rien n’est inventé.
.space Jill Gasparina, 2023 « Youri Gagarine m’est apparu au petit déjeuner ». Cette déclaration de Marianne Vieulès fait référence à l’une de ses pièces Breakfast Youri (2019), petit dessin sur pain grillé reprenant la photo iconique du cosmonaute au moment de la fermeture de la capsule Vostok qui l’emmène pour la première fois dans l’espace en avril 1961. Cette pièce appartient à l’une des branches du travail de l’artiste, à savoir le « département spatial » ( un terme qui évoque les fictions institutionnelles de l’artiste belge Marcel Broodhaerts, qui au tournant des années 1970 travaille sur un vrai-faux Musée d’Art Moderne). C’est autour des œuvres de ce « département » que l’artiste a imaginé l’exposition À 13 milliards d’années lumière. Nourries par le cinéma, la science-fiction, mais aussi par l’histoire des technologies, celles-ci ont pour caractéristique d’associer l’imaginaire du spatial à une dimension proprement terrestre, qui tient le plus souvent de la représentation de la vie quotidienne, non dénuée d’une certaine trivialité. My JPL, par exemple, est un laboratoire de performances où l’artiste « essaie de faire voler des choses », une version basse technologie du Jet Propulsion Laboratory, l’un des plus gros centres de recherche de la NASA basé en Californie, et spécialisé dans l’exploration robotisée du système solaire. Elle a, dans ce cadre, expédié des œufs au plat à près de 27 m d’altitude (!), ou fait léviter une couverture de survie. L’exploration de Mars peut attendre. Autre exemple, Marianne Vieules a réalisé une serre qui renvoie aux recherches sur les systèmes de support-vie régénératifs menées dans le cadre de programmes de vol de longue distance, ainsi qu’à toute l’iconographie du cinéma de SF qui s’en inspire, de Silent Running (1972) à Sunshine (2007). Mais dans le même temps, elle évoque, par son échelle, ses matériaux et sa dimension pauvre, cette activité toute terrestre que constitue le jardinage du dimanche. L’artiste revendique justement son appartenance au monde des amateurs, et explique avec humour avoir suivi, lors d’un échange universitaire à Concordia, au Canada, des cours d’ingénierie aérospatiale, « le seul moment un peu scientifique de toute [s]a vie. » « Je travaille sur l’impossibilité d’y aller », explique-t-elle encore, à propos de sa fascination pour l’imaginaire de l’espace. Ainsi, par delà ce tropisme extraterrestre qu’on retrouve encore dans le poème génératif You Are an Astronaut, ou dans le jeu Waw !, inspiré du baseball autant que par les pratiques de communautés ovniphiles, ce qui ressort peut-être le plus de son travail, c’est la défense de cette faculté essentielle que constitue l’imagination. Le fond vert des galaxies nous le montre : imaginer suffit. Ce goût se traduit également dans ses recherches, marquées par le féminisme, sur l’histoire des femmes dans l’informatique (absentes de l’exposition) : il est aussi difficile aujourd’hui d’imaginer une société égalitaire que l’installation longue durée d’un groupe d’humains sur la surface de la Lune ou de Mars. On comprendra alors mieux cette laconique bio, affichée sur son site web : « Marianne Vieules/ lives and works on Earth ». En quelques mots, il s’agit de manifester la dimension cosmique de notre situation planétaire, un petit point bleu pâle insignifiant au milieu du grand tout, en rappelant fermement que cet ancrage terrestre nous définit totalement. Texte écrit à l’occasion de l’exposition À 13 milliards d’années lumières au Centre d’art Chasse spleen
Après le Big-Bang Didier Arnaudet, 2022 Marianne Vieulès nous convie à une exploration d’un espace inconnu, imprévisible et pourtant étrangement familier, qui découle de la science et de ses applications technologiques, de la fiction littéraire, cinématographique et de ses mécanismes d’extrapolation, de projection et d’extension. C’est un espace narratif tout autant qu’un espace de création dans lequel même le vide devient une présence. Cet espace, réceptacle d’astres distants, nous l’expérimentons à travers les connaissances accumulées par la conquête spatiale mais aussi dans les méandres de nos imaginaires peuplés de vaisseaux à vitesse supérieure à celle de la lumière et de planètes en révolution qui s’attirent, se repoussent et tournent sur elles-mêmes, abritant peut-être des civilisations extraterrestres. Mais pour atteindre ces astres lointains, encore faut-il traverser l’espace interstellaire dont les dimensions dépassent toute capacité d’appréhension par l’esprit humain. Marianne Vieulès puise dans ce réservoir où s’entremêlent la vérité romanesque et la fiction scientifique, le temps protéiforme, multidirectionnel et subjectif, les transgressions, les résurgences et les hantises, les figures spectrales, les possibles paradoxaux et les déchirures irréversibles. Son exposition intitulée À 13 milliards d’années-lumière nous propulse, après l’explosion d’un néant, au cœur de cette matière noire dans l’Univers qui n’était pas encore devenu transparent à la lumière, et nous entraîne dans cette fabuleuse histoire de la formation des galaxies, de leur dynamique et de leur évolution depuis le Big Bang. Elle se déploie comme un archipel de propositions poétiques, fictionnelles ou scientifiques qui s’ébranlent, s’incarnent et se transmuent en une substance singulière, formidablement vivante. Ainsi l’investigation d’un trou noir, l’odeur du popcorn, le lien entre les règles du baseball et l’apparition de signes extraterrestres, le décollage d’une couverture de survie, le portrait de Youri Gagarine sur un pain grillé, l’heure affichée dans les différentes planètes du système solaire, l’enseigne du cinéma Comète, la chute d’une météorite, la serre comme système de support de vie régénératif et la calamiteuse adaptation vidéoludique du film de Spielberg E.T. produisent une effervescence qui, tout en assumant son incongruité, captive par le jaillissement de sensations brutes et denses en abolissant toute frontière et en agissant activement sur le spectateur. Marianne Vieulès propose une démultiplication foisonnante des investigations sans pour autant céder à la dispersion ou à l’accumulation. Les miroirs qu’elle explore sont certes des miroirs brisés, offrant des réfractions obliques permettant à toutes les virtualités d’exister, mais sans jamais perdre la direction de la cible visée. À partir d’une position terrestre bien affirmée, elle sonde les profondeurs de l’origine, là où le réel est encore hors d’atteinte, là où tout part et où tout revient, et, tout en glissant à la surface du présent, maintient sous pression un futur en chantier. Article paru dans JunkPage n°89
Salon de Montrouge 2018 Audrey Teichmann, 2018 Marianne Vieulès, « astronaute indépendante », livre, dans un récit à l’ironie cosmique, les étapes de son entraînement en vue d’une impossible conquête de l’espace. Les œuvres produites selon ce principe d’autofiction poursuivent le pacte oxymorique commandant l’existence contingente d’un récit de soi et d’une fiction, d’une forme de mensonge, ou utopie, et d’une sorte de vérité, ou matérialité. Transposition au sol d’une aventure stellaire, l’installation You Are an Astronaut est ainsi lieu d’entraînement et de préfiguration, tout comme l’apparition du visage de Youri Gagarine sur un toast grillé (Breakfast Youri, 2017) est la révélation d’une vocation à l’image du visage christique sur le voile de Véronique. Vocation, précisément, dont l’artiste démultiplie les champs de l’impossible réalisation, jusqu’à la mythologisation d’objets et discours « réagencés en une configuration esthétique qui aboutit à une refiguration du réel ». La rudimentaire Tin can ou Space Green House (2017) est alors une capsule-serre spatiale étudiant la possible survie de la biosphère au-delà de l’atmosphère terrestre. Un large tissu vert est L’espace sidéral digital ou Le fond vert des galaxies, base d’entraînement pour sortie extra-véhiculaire (2017), un paysage abyssal transposable de sol terrestre en sol terrestre avec l’espoir sarcastique d’un voyage qui n’aura pas lieu. En lien avec la conquête spatiale, dont l’artiste rappelle le rôle historique de contrôle et de cartographie, Marianne Vieulès traite de l’omniprésence des caméras de surveillance : Closed-circuit television (2015) médiatise ainsi au travers d’un compte Instagram des images issues de ces sources illimitées et masquées. Work work work se concentre sur les images de personnes au travail, que l’artiste sophistique au moyen d’un algorithme de « reconnaissance du travail ». L’ironie confine à l’absurdité, n’empêchant pas l’artiste de continuer à propulser des objets à défaut de s’envoler elle-même.